LES MIGRANTS DE MACEDOINE

Migrants en MacédoineGradsko est une petite municipalité connue pour les ruines de la ville antique de Stobi, traversée par le fleuve Vardar et par l’autoroute qui relie Skopje à Thessalonique en Grèce. Par ailleurs, la ligne de chemin de fer qui contourne la ville est devenue l’une des principales voies d’accès géographiques à l’espace Schengen. Depuis peu, les trains ne s’arrêtent plus à Gradsko car, en ce début de mois d’août 2015, le pays assiste à un afflux constant de migrants que l’État central peine à juguler.

À la gare du village de Gradsko, situé au centre de la République de Macédoine, les trains passent plusieurs fois par jour. À l’intérieur, on y distingue des dizaines de migrants entassés, assis sur les marches des trains, les portes grandes ouvertes, pour profiter du vent qui atténue la chaleur accablante du mois d’août et qui rend supportable la promiscuité des wagons.

Pour certains migrants, c’est à pied, à vélo ou en camionnette qu’ils prennent la route qui les conduit jusqu’à l’espace Schengen : promesse d’un avenir meilleur.

En quelques mois, la route des Balkans est devenue un axe migratoire central. Depuis le début de l’année, plus de 50 000 migrants ont traversé la Macédoine pour tenter de rejoindre l’Union Européenne. Ils viennent essentiellement de Syrie, d’Afghanistan, d’Irak ou de Somalie et tentent de rejoindre l’Allemagne ou la Scandinavie. Ils arrivent à Izmir en Turquie puis rejoignent la Grèce avant d’entrer en Macédoine.

Fin juillet 2015, les autorités macédoniennes débordées par le nombre de migrants se sont résignées à laisser passer les trains, sans arrestation ni contrôle. La police ne tente plus d’arrêter les migrants qui rejoignent la Macédoine depuis Thessalonique tandis que la question migratoire vient alimenter les tensions entre les deux États.

Face à l’augmentation incontrôlable de nouveaux migrants, le 20 août, le gouvernement de Skopje a déclaré l’état d’urgence et a proclamé la fermeture de la frontière gréco-macédonienne mais les migrants continuent de passer en force.

Aux yeux des organisations spécialisées dans la défense des droits des migrants, il s’agit d’un aveu d’impuissance manifeste face à un phénomène qui s’amplifie depuis le début de l’été 2015, comme en témoigne Nikola Poposki(1) : « A moins d’avoir une réponse européenne à cette crise (…), personne ne doit nourrir l’illusion que cela peut être réglé ».

Fin août, un grillage faisant office de clôture douanière a été érigée entre la Macédoine et la Hongrie au grand dam des ONG internationales. Entre régulation, laisser-faire et répression : la Macédoine cherche à solutionner le défi migratoire et à canaliser les mouvements des populations en attendant une aide européenne massive.

La route des Balkans est certes moins risquée que la Méditerranée mais elle est aussi plus longue et plus dangereuse. Si la Macédoine est un pays de transit depuis plus de trois ans, le flux de nouveaux arrivants a pris une ampleur jamais vue depuis le début de l’année. Les rares Organisations Non Gouvernementales présentes dans le pays, peinent à pourvoir aux besoins primaires des migrants face à leur augmentation permanente. Parmi elles, Médecins Sans Frontières estime que deux à trois mille migrants transitent par le pays chaque jour.

En Macédoine comme ailleurs en Europe, le phénomène a réveillé les consciences citoyennes. La vague de solidarité des citoyens macédoniens s’est accompagnée d’une montée des radicalismes d’extrême droite, opposés à toute forme d’immigration.

La Macédoine cherche encore une politique migratoire cohérente, à l’instar des pays voisins. Chacun attend la mise en place rapide d’une politique européenne commune qui permette la régulation, dans le strict respect des droits de l’Homme, concernant les migrants. L’Union européenne a qualifié le phénomène de « pire crise de réfugiés depuis la Seconde Guerre mondiale ».

par Louise Pinton

(1) : Nikoa Popovski est Ministre des Affaires étrangères de Macédoine des gouvernement Gruevski III et IV.