La Belgique, au mauvais endroit, au mauvais moment.

Depuis sa création, la Belgique était neutre et toutes les grandes puissances respectaient cet accord. Pourtant, le 4 aout 1914, l’Allemagne en décida autrement. Le peuple et le gouvernement belges s’ attendaient-ils à une telle trahison?

27 km/heure de moyenne. Un exploit! Le 28 juillet 1914, dans les rues de Bruxelles, les gens se passionnent pour le tour de France. Leur compatriote, Philippe Thijs vient de passer la ligne d’arrivée. Le soleil brille depuis des semaines. Peu s’inquiètent du sort de la Serbie, qui venait d’être envahie par les troupes de l’ empire austro-hongrois.

Le 29 juillet, au cirque royal de Bruxelles, Jean Jaurès (1) enflamme les foules avec à ses côtés l’Allemande Rosa Luxemburg. Ensemble ils diffusent un message de paix et rallient les ouvriers.

Mobilisation et méfiance générale

Le gouvernement belge se croit prévoyant.  L’armée réclame des chevaux et rappelle  trois classes de milices. Ces soldats iront protéger les forts de Liège, qui étaient peu surveillés et faiblement entretenus. Il faut dire que le pays n’avait jamais connu de guerre. D’ailleurs jusqu’en 1909, les jeunes hommes appelés à faire leur service militaire étaient tirés au sort.  Mais depuis la crise d’Agadir en 1911 (2), le gouvernement tient une politique secrète. Albert I, le roi des Belges, croit  au respect de la neutralité de son pays mais il reste méfiant. Certaines routes qui mènent à l’ Allemagne sont minées. En 1913, le service militaire devient obligatoire, pour tous.

Le 31 juillet à 19 heures, le cabinet des ministres décrète la mobilisation générale. Les crieurs publics s’époumonent.  Les hommes se pressent aux casernes. A l’intérieur, civils et soldats chantent. Peu croient à la guerre et tous pensent que si elle éclate, elle sera courte. La neutralité belge n’avait-elle pas été respectée en 1870, lors de la guerre franco-prussienne ? En plus le chancelier allemand semble pacifiste. Comme Albert ne tient pas à ce que la mobilisation soit mal interprétée, il envoie à toutes les grandes puissances européennes une note rappelant la neutralité belge. Tous les dirigeants y répondent. Tous… sauf le Roi de Prusse. Albert tente de rester optimiste.

Quant à la population, elle est de plus en plus méfiante. On ne sait jamais… Beaucoup stockent de la nourriture. Les prix montent. Les Belges craignent la dévalorisation des billets. Des foules se massent devant la Banque nationale, à Bruxelles, à côté de la cathédrale, mais également devant les filières, partout dans le reste du pays.

Au matin du 2 août 1914, l’ambassadeur d’Allemagne en Belgique, semblant ignorer le plan von Schlieffen (3) rassure la population belge. Pourtant, dans l’après-midi, il reçoit un communiqué de Berlin l’informant que des troupes françaises s’apprêtent à entrer en Belgique par Namur et Givet. En conséquence, l’ Allemagne demande le libre passage de son armée. Le gouvernement belge a 12 heures pour répondre à cet ultimatum. Comme les ministres belges et leur Roi avaient déjà envisagé cette éventualité, en moins de 40 minutes, la réponse apparait, comme une évidence: la Belgique opposera la plus vigoureuse résistance à l’envahisseur allemand.

La machine infernale de la première guerre mondiale est lancée, suite à l’un des mensonges les plus méconnus de l’ Histoire…Quelques jours plus tard, le chancelier allemand avoue. L’invasion française avait été inventée de toute pièce par Berlin… Un prétexte pour envahir le Belgique.

Marie Bourguignon

(1) Homme politique français socialiste et pacifiste, assassiné le 31 juillet 1914 à Paris.

(2) Incident diplomatique et militaire au Maroc entre l’Allemagne et la France qui failli déclencher un nouveau conflit entre les deux pays.

(3) Le plan Schlieffen prévoyait d’envahir la France à partir du déploiement d’une armée au nord, entre Aix-la-Chapelle et Thionville et d’une armée au sud entre Metz et Strasbourg d’armées.